L'inconnue du 22 heures 43.

Un grand sourire surgit dans le couloir, précédant une valise lourde, comme le train s'ébranlait en douceur, ainsi que font les trains de nuit, accompagné des bruits caractéristiques - les freins qui se détendent et les crochets qui se tendent, les roues qui crissent sur le fer du rail. C'était l'été. Par la fenêtre du couloir grande ouverte, je profitais de la douceur de la nuit, en regardant disparaître la gare Saint-Charles. Elle s'approcha, billet à la main, cherchant son compartiment. Pas très grande, de jolies formes, et ce sourire... qui prenait, comme elle se tenait devant moi, un air enjôleur.

Depuis des années je prenais le train de nuit, Marseille-Paris, en rêvant d'une belle inconnue dans mon compartiment. Elle me dit dans un souffle :
- Je crois que nous sommes dans le même compartiment.

Je hissais sa valise dans le filet et la laissais s'installer, retournant à ma fenêtre, regarder défiler le paysage, la baie de Marseille devinée entre deux bâtiments, puis le port, et ses piles de conteneurs colorés. Elle vint me rejoindre quand nous passions au-dessus de l'Estaque. La nuit étoilée et chaude, la nouvelle lune qui brillait sur la mer, les odeurs de la nuit provençale inondaient l'espace. Ses longs cheveux bruns claquaient au vent.
- Je n'arrive pas à dormir, dit-elle enfin.
Je bafouillais quelque chose d'identique. Je suis d'un naturel timide, mais il est des situations où les inhibitions ne sont pas de mise. Rapidement la conversation s'engagea. Elle parlait avec douceur, riant d'un naturel désarmant, souriant avec constance. Le bruit ambiant nous a fait nous rapprocher, petit à petit.

A Avignon, nous parlions comme si nous étions de vieux amis. A Orange, il n'y eut plus de passage dans le couloir, à part le contrôleur de temps en temps, mais nous n'avions pas envie de rejoindre les autres passagers, ballotés sur leur couchette inconfortable et étroite, d'autant que le compartiment était plein. Avant Montélimar, j'eus soudainement envie de l'embrasser et elle n'opposa aucune résistance. Nos langues se mélangèrent et très vite, sans se poser de questions, nos mains courraient sur le corps de l'autre. Je pris son sein, il était rond et plein. Son corps chaud, collé contre moi, m'excitait. Je sentis ma verge gonfler. Alors je filais sous le chemisier, à la recherche de cette poitrine attirante, puis j'entrepris de dégrafer son soutien-gorge, la libérant.

A l'arrêt de Valence, nos corps enlacés debout occupaient le couloir et je vis le contrôleur hésiter, puis descendre sur le quai pour remonter dans le train à l'autre porte. J'appréciais sa délicatesse, d'autant plus que quelques minutes plus tôt, elle m'avait laissé ouvrir le bouton de son pantalon. Ma main était descendue vers son pubis, ses poils doux enserrant mes doigts aventureux, tandis que mon majeur lui titillait déjà le clitoris. Elle était trempée. Un frisson me parcourut l'échine. Elle sentait contre sa cuisse mon sexe durci dans mon pantalon. Mon doigt plongea dans sa chatte.
Elle poussa un petit cri et elle jouit, en silence.

Nous restâmes ainsi deux bonnes heures, gonflés de sèves, à nous découvrir. J'eus le plaisir de lui offrir plusieurs orgasmes de la sorte. Son corps vibrait sous les assauts de ma main, elle frémissait, se cabrait, s'affaissait, se relevait, sa poitrine nue sous le chemisier léger faisait un spectacle magnifique et nos langues emmêlées ne cessaient le petit jeu de l'ivresse. Parfois je lui mordillais le lobe d'une oreille, et son souffle augmentait...

À Perrache, nous restâmes en rade sur un quai désert.
- On va se coucher ? proposa-t-elle en se rajustant.
Nous nous allongeâmes sur ma couchette, faisant fi de son étroitesse. Le souffle régulier de nos compagnons prouvait qu'ils étaient plongés dans le sommeil, mais comment dormir ? et nous avons continué les caresses. Quand le train reprit sa marche vers Paris, elle entreprit délicatement de dégager mon sexe qui n'en pouvait plus et me branla avec douceur, parfois sa bouche se collait à lui, tandis que ma main explorait sans cesse son con humide, chaud et admirablement pourvu d'une toison douce.

Bercés par les cahots du train, nous nous offrions sans retenue. Au bout d'un long moment, j'éjaculais dans sa bouche, sur son cou et sa main. Un orgasme inouï et mémorable. Nous avons fini par nous endormir, étourdis de fatigue et de plaisir, emmêlés, collés par mon sperme, jeunes et heureux.

A la gare de Lyon, nous avons bu un café et dévoré un petit déjeuner à l'Européen, puis chacun est reparti vers son destin. C'était à une époque que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, une époque où les fenêtres des trains pouvaient s'ouvrir et offrir à deux cœurs esseulés de se rapprocher et de faire connaissance...
J'ai revu quelques fois l'inconnue du 22 heures 43. Elle ressemblait assez à cette jeune demoiselle...